SkwalZone
SkwalZone.org(Fr) : Présentation : Interview Patrick Thias Balmain (inventeur du skwal)

N'ayant pas eu pour l'instant la possibilité de rencontrer Thias Balmain pour l'interviewer, nous avons tout de même réalisé une interview par email.
[Interview email réalisée par Linsor]

En ce qui concerne la conception d’un skwal, nous aimerions savoir comment le premier skwal a été crée et combien de temps il a fallu pour qu’il soit sur le marché ?

La première idée date de 89 (j'ai bricolé un ski avec des fix de snow alpin), mais c'est en 92 que j'ai réalisé mon premier proto digne de ce nom.

Le Logo Thias

Est-ce que c’est toi qui as dessiné chaque skwal ? Les as-tu à chaque fois testés ?

Oui. J'ai dessiné les planches, réalisé les protos, généralement en collaboration avec la marque qui allait les produire ensuite (Lacroix, surfpolitix Canada, Elan). Je définis tout d'abord le programme de la planche, je mets au point les formes, puis je définis les flex et torsions à partir de plusieurs protos aux qualités différentes. Une fois le proto affiné, je réalise une pré-série qui deviendra le produit mis en marché l'année suivante. Pour qu'un skwal arrive à la vente dans un mag., il faut compter entre un et trois ans. La mise au point la plus longue a été celle du skwal free ride à bottes.

Pourrais-tu brièvement raconter la conception d'un modèle qui t’a particulièrement tenu à cœur?

Un skwal que je n'aime pas, je ne le réalise pas. C'est justement une histoire de cœur.

Qu’est-ce qui a été le plus difficile dans la création de nouveaux skwals ?

D'obtenir un soutien financier. J'ai commencé avec rien et j'ai toujours travaillé avec très peu de moyens.

Est-ce que c’est la demande de la clientèle ou le désir de proposer une gamme plus importante qui vous a poussé à créer d’autres modèles ?

Pour que le skwal soit reconnu comme un sport de glisse à part entière, il m'a semblé important d'avoir une gamme complète, surtout d'ailleurs, parce que les gens croient que le skwal est un engin seulement fait pour aller vite en grandes courbes sur piste et carver à mort.

Un petit échantillon de la gamme Thias
(2 modèles Easy 165 et un 173°F)

De tous les skwals qui sont sortis, y a-t-il un skwal que tu préfères ? Pourquoi ?

Personnellement, j'utilise plus le 173°f. Mais pour le free ride, c'est la FR 167 monté en soft boots snowboard, qui est le plus délire: 17 cm au patin (entre les pieds).

Le très récent TS 167 adapté aux softboots.

Penses-tu que la gamme aujourd’hui soit complète ?

Non ! Il reste plein de truc à faire et à tester.

Pour toi, quel est le matériau idéal ? Y a-t-il déjà 'le' skwal parfait ?

J'aime les noyaux bois, pour leur longévité et leur réactivité. Hors mis la 120, elles sont toutes en noyau bois.

Peux-tu nous parler des fixations ?

Il y a deux types de fix: hard et soft. En hard, j'ai développé une fix qui fonctionne bien, très résistante, parce que chargée en fibre de verre. En Soft, j'utilise la fix Step in Rossignol, Emery ou O sin. Ce sont les mêmes sous différentes marques. La botte doit être une free ride très rigide latéralement (dans les mêmes marques), avec le spoiler extérieur à la chaussure et un scratch en haut de chaussure pour la rigidifier (modèle d'origine) .
Cette fix est assez nulle pour le snowboard mais bien pour le skwal parce que la tige de fixation est en travers du pied, ce qui facilite le transfert latéral de carre à carre.

Es-tu satisfait de tout ce que tu as fait ? Quels ont été les moments particulièrement difficiles et particulièrement heureux (depuis que tu as commencé) ?

Est ce que je suis content de moi ? Je te retourne la question. En tout cas, j'ai fait.
Particulièrement heureux :
- quand j'ai vu pour la première fois une armada de moniteurs de l'UCPA dévaler le glacier de la grande motte à Tignes, avec le sourire jusqu'aux oreilles. C'était en 93.
- Skwaler les conditions de rêve en partageant ça avec des potes de glisse.
- arriver à produire pour partager ce plaisir avec d'autres (sans forcément les connaître d'ailleurs).
Particulièrement dure : ne pas trouver le soutien des banques et des investisseurs privés. Et ce n'est pas faute d'avoir essayé.

Quand tu as lancé Thias, tu as pris le pseudo de " requin " et donner des noms de Félins aux premiers skwals. Etait-ce un choix personnel?

Skwal vient du mot français squale qui est un synonyme de requin. J'ai choisi ce nom là parce que ce n'était pas un monoski et qu'il fallait le baptiser autrement. Je l'ai appelé comme ça pour son côté mordant et incisif. J'ai pris sa forme phonétique skwal pour rappeler son origine alpine: le ski.
Les félins ont été choisi par le team Bertrand, Polo et moi, pour se démarquer, par les taches, du marché du snow et du ski. Il y a aussi quelque chose de félin dans l'attitude du skwaleur.

Thias Balmain en action.

Comment vous êtes-vous partagés les différentes responsabilités au sein de Thias entre toi et B.Roy ?

Bertrand est le responsable commercial et assure le suivi de production. Polo, de la partie finance et moi des produits et de tout ce qui concerne les actions sur la neige. Pour nos choix marketing, c'est un travail d'équipe.

As-tu des idées d'évolutions que vous n’avez pas pu réaliser faute de moyens ?

Une chaussure et une fix spécifique soft boots free ride.

Que penses-tu de la concurrence (Monocarver de Volkl) ?

Très bien.

Es-tu en contact avec eux ?

Oui. Tu peux les choper sur internet.

D'autres marques sont-elles intéressées par la production de skwal ?

Bien sûr ! mais elles attendent que la quantité soit là, pour vampiriser le marché. Des industriels quoi!

Les majors du ski (excepté Volkl) ne se sont pas lancés dans le skwal, penses-tu que malgré une bonne publicité, il ne soit pas possible de développer un marché plus important?

Le marché est naissant. La plupart des gens font ce qu'on leur dit de faire. Ski, snowboard sont dans la place aujourd'hui. Gros budget de com = résultat presque assuré.

Elan s'est principalement occupé de la production, as-tu des contacts avec d'autres constructeurs pour assurer une production plus continue ?

Ce n'est pas le problème. Il faut que les marques s'investissent mais elles préfèrent rester concentrées sur le gros gâteau ski/snow.

Crois-tu qu'il serait bon qu'il y ait plus de concurrence ?

Bien sûr. Plus de marques veut dire plus de com, plus d'actions terrain et la boule grossira à force de la faire rouler.

Pourrais-tu nous dire pourquoi le skwal semble avoir beaucoup de succès au Japon ? Sais-tu pourquoi les américains ont l’air moins branché skwal ?

Parce qu'il y a des gars qui s'investissent, qui y croient et qui agissent. Je n'ai jamais trouvé d'importateur américain pour le skwal malgré des salons pro et un an dans le Colorado.

Un rassemblement Thias au Japon.

Tu as déposé le brevet avec Manuel Jammes, je crois que l'idée du skwal a germé en même temps chacun de votre côté. Peux-tu nous raconter comment cela s'est passé et comment vous vous êtes rencontrés ? [voir le brevet (.pdf)]

Nous avons déposé, chacun de notre côté, sans connaître l'existence de l'autre, un brevet sur un thème similaire à deux mois d'intervalle. Il a l'antériorité du dépôt. J'ai eu connaissance de son brevet quand il s'est manifesté lors de l'arrivée sur le marché du skwal que j'ai développé chez Lacroix. Il n'a développé aucun proto et a revendiqué la propriété de l'invention. Lorsque j'ai créé ma marque, nous avons mis nos brevets en commun dans skwal Thias sa.

Tu donnes des cours de skwal. Selon toi, à partir de quel âge peut-on commencer le skwal ?

Aux alentours de 7 ans.

L'easy 120, idéal pour un enfant !

Penses-tu que le skwal soit facile ou difficile à apprendre ? Est-ce qu’un snowboarder peut apprendre plus facilement le skwal que quelqu’un qui n’a fait que du ski alpin ?

Le skwal est plus facile à apprendre pour un skieur, que le snowboard. J'ai réalisé un grand nombre de tests pour pouvoir l'affirmer.

On parle beaucoup de skwaleurs, y a-t-il autant de femmes qui skwalent ? Peux-tu dire pourquoi les femmes seraient moins tentées d’essayer que les hommes ? Est-ce que pour toi, le skwal est une discipline qui s’adresse plutôt aux hommes ?

On appelle une femme qui skwale, une skwalinette. Elles sont moins nombreuses que les hommes. C'est le cas pour toute discipline nouvelle dite "extrême". C'était le cas en snowboard au début.

On parle de skwal sans bâtons… et pourtant, on peut skwaler aussi avec des bâtons… On dirait presque qu’il s’agit de deux disciplines… Peux-tu nous dire ce que tu en penses ? Selon toi, est-ce que les bâtons de carving conviennent aussi au skwal ? Penses-tu que les bâtons sont utiles pour débuter ou au contraire qu'ils sont un frein à la progression ?

Un exemple d'utilisation des batons.

Pour comprendre l'intérêt des bâtons, il suffit de faire une comparaison avec le ski. Sans bâtons le ski est plus difficile et moins intéressant. Il en est de même pour le skwal. En ce qui me concerne, j'ai beaucoup pratiqué sans bâtons. Aujourd'hui j'utilise les bâtons. Ils m'ouvrent un champ d'action bien plus large. Pour moi, le skwal de demain se pratiquera avec des bâtons, même en extrême carve. Il suffit pour cela de placer le bâton perpendiculairement à la planche, à l'horizontal sur la neige, en relevant la main et en s'appuyant sur l'avant bras.

Y a-t-il des chaussures plus adaptées que d’autres pour le skwal ?

Les chaussures de snowboard hard ou les chaussures de ski soft. Personnellement j'utilise des kneissl soft boots de ski avec la chaussure arrière un peu moins serrée au collier.

Penses-tu que le skwal peut coexister sur les pistes avec les autres formes de glisse?

Pensez vous que les blacks, les beurs ou les chtimis ont leur place dans notre société ?

Peux-tu nous dire comment devenir professeur de skwal ? Y-a-t’il des examens ?

Il n'y a qu'un diplôme : le brevet d'état de ski alpin qui donne le droit d'enseigner ski, snowboard, télémark, skwal etc...

Quel est selon toi le meilleur moyen de promouvoir ce sport ?

Pratiquer dans le respect des règles de sécurité et dans le respect des autres formes de glisse avec l'état d'esprit qui anime les précurseurs que nous sommes.

Que penses-tu aujourd’hui de l’avenir de cette discipline ?

J'ai dix ans de pratique et j'aime toujours autant ça. Un jour ça décollera. Quand ? c'est autre chose. A la limite, peu importe. Les télémarkeurs vivent leur passion dans leur microcosme. C'est un peu pareil pour nous. Devons nous être nombreux pour exister ? s'amuser ? délirer ? Un jour les "gens" s'en empareront et là…

Thias Balmain

Merci beaucoup d’avoir accepté de répondre à ces questions.

Merci à vous de faire vivre ce site.

Copyright© 2002-2003 skwalzone.org   -   nommam2000@yahoo.fr